Ville de Mons-en-Barœul
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Accueil > Gabriel Pagnerre, un architecte hors norme

Sa jeunesse et le début de sa vie de jeune adulte

Gabriel Eugène Pagnerre est né le 4 octobre 1874 à Petite-Synthe, un canton dans la banlieue dunkerquoise. Gabriel Pagnerre, comme on l'appelle plus communément, a fréquenté les Beaux-arts de Lille avant de rejoindre l’entreprise familiale. Lucien, son père, entrepreneur en bâtiment puis architecte, a déjà beaucoup de succès à La Madeleine où ils se sont installés. Le style de la « Maison Pagnerre » est très inspiré des belles « Dunkerquoises » du bord de mer. Les façades sont solides, ouvragées et s’inspirent de l’architecture traditionnelle flamande. À Lille et dans sa banlieue, cette inspiration maritime dépaysante séduit la bourgeoisie industrielle. Les maisons de Lucien et Gabriel sont solides, fonctionnelles et construites avec soin. Elles nous sont d’ailleurs parvenues sans la moindre ride. Père et fils co-signent - rarement formellement - ces maisons de la transition entre le XIXe et le XXe siècles, à l’instar de cette maison du début de la Rue Pasteur, à Mons-en-Barœul.

L’envol, ouverture de son propre cabinet d’architecte

En 1905, Gabriel Pagnerre crée son propre cabinet d’architecture (malgré le fait qu’il n’ait pas réussi à obtenir son diplôme étant déjà trop avangardiste) au 255 Grande route de Roubaix (actuelle Rue du Général de Gaulle) à Mons en Barœul où il s’installe. À cette époque, c’est un bourg rural, situé à quelques kilomètres de Lille. Dans les sous-sols de cette grande rue est enfouie une canalisation, qui mène à l’usine à gaz de Wazemmes (Lille). Il est possible de construire en ce lieu, possédant un vaste foncier, des maisons de prestige dotées de tout le confort moderne : le chauffage et l’éclairage au gaz.

Cette nouvelle et première construction du tout jeune entrepreneur sera aussi son domicile familial. Gabriel Pagnerre y mêle l’inspiration flamande et néo-orientale. Le dessin, alliant symétrie et dissymétrie, est très élégant. Les détails ornementaux sont soignés. La façade utilise des matériaux de prestige. En même temps, le jeune architecte s’inspire du courant « Art and Craft », développé en Angleterre et en Belgique et popularisé par les revues d’architecture à la mode.

La maison du futur architecte est une forme indirecte de publicité, alors interdite par la profession. C’est un appel aux clients potentiels, nouveaux acquéreurs d’une parcelle de la rue ou de celle voisine de la Pépinière (aujourd’hui, Rue Henri-Poissonnier).

Les premiers grands projets

C’est pour cette même Grande route de Roubaix, où se trouve son tout nouveau cabinet d’architecte, qu’il dessine et fait construire de nombreuses maisons et villas inspirées des « Dunkerquoises » du bord de mer, dont la Villa Saint-Luc.

Sa stratégie de « cabinet/maison publicitaire » est payante. Beaucoup de maisons du quartier seront dessinées par le jeune architecte nouvellement arrivé à Mons-en-Barœul. Gabriel Pagnerre s’efforce de construire des maisons qui soient le reflet de leur propriétaire tout en suivant son tempérament. Son style est fait d’inspiration régionaliste qui renvoie au passé tout en adoptant des innovations, empruntées aux tendances contemporaines. (Un savant mélange entre le néo-régionalisme flamand, le style Second Empire, l’Art Nouveau et l’Art Déco).

Le « Vert Cottage » une œuvre totale !

En 1912, le Monsois est à l’apogée de sa carrière. Son père, Lucien, décède et Gabriel devient la seule référence de l’entreprise familiale. Il obtient aussi cette année-là, son diplôme – tant attendu – d’architecte, ce qui lui permet désormais de pouvoir prétendre à concourir aux appels d’offres des marchés publics, alors qu’auparavant, seule la construction privée lui était accessible. Il déménage également son cabinet d’architecte dans la maison de ses rêves, dont il a dessiné les plans. « Le Vert-Cottage », qu’il vient de construire au 4 bis de la Rue du Quesnelet. Un chef d'œuvre, une œuvre totale ! Dans cette période d’avant-guerre, il est devenu la coqueluche de la bourgeoisie triomphante de la métropole lilloise !

La Guerre 14 - 18, un engagement patriotique

Gabriel Pagnerre, alors âgé de 40 ans et père de 3 enfants, ne fait pas partie des hommes mobilisables. Et pourtant en août 1914, en vacances dans une maison de Malo-les-bains, il décide de s’engager à Dunkerque. 

Tandis que le « Vert Cottage » sert de lieu d’hébergement pour l'État-major allemand, lui, est au fond des tranchées du front de l’Est. Versé au Génie, il démontre son savoir-faire dans l’art du franchissement des cours d’eau, l’aménagement des routes, la pose des voies de chemin de fer, le creusement des galeries de mine, le maniement des charges explosives, la construction d’abris en béton. En août 1915, il est élevé au grade de sous-lieutenant et en octobre 1917, il est nommé lieutenant. Lorsque la paix revient et au début de l’année 1919, il rentre tout juste pour assister au funérailles de sa mère qui vient de succomber au fléau qu’est la grippe espagnole au sortir de la guerre. A partir de cette époque, il changera l'ordre de ses prénoms, et se fera appeler Eugène Gabriel en hommage à sa maman.

Avant-gardiste, des maisons pour la jeune classe moyenne bien avant la « Loi Loucheur »

Au milieu des années 1920, il entreprend, bien avant que la « Loi Loucheur » ne soit promulguée, un programme de construction de maisons économiques, dont la Rue Pasteur de Mons en Barœul est un exemple emblématique. De dimensions modestes, elles sont réalisées avec soin, avec à chaque fois un décor différent au niveau de la façade. L’une d’entre elles, le numéro 74, et même construite en béton armé, un matériau encore très peu utilisé, à l’époque, dans l’architecture civile. Aujourd’hui, ces maisons sont très recherchées. À la fin de la décennie, la promulgation de la « Loi Loucheur » (1928) va lui permettre de multiplier ce type de programmes de construction « d’Habitations Bon Marché », comme celui du quartier du Plouich, à Marcq-en-Barœul, où des rues entières de maisons « Loucheur » vont être construites. Dans cette période, postérieure à 1912, il va aussi réaliser quelques bâtiments publics : des écoles à Halluin et Saint-Pol-sur-Mer, des Bains Publics, à Villeneuve-d’Ascq et Hellemmes, un dispensaire, une bibliothèque et même une Maison du Peuple.

La fin de sa carrière

Dans les années 1930, il se positionne de nouveau sur des projets prestigieux qui rappellent par leur ambition la période florissante d’Avant-guerre.

En 1929, il construit la “Maison Isotherme” complètement en béton armé, une première dans la métropole lilloise, et en 1934, il livre une autre grande maison en béton sur le Grand-Boulevard, Rue César Franck à Lille. Ces projets suivent les règles de l’architecture fonctionnelle et rappellent le travail de Mallet-Stevens architecte de la Villa Cavrois (Roubaix-Croix). Ami, dont il soutiendra la candidature au poste de directeur des Beaux-Arts de Lille. En 1933, fraîchement nommé Secrétaire du Syndicat Régional des Architectes du Nord, il invite Le Corbusier, qui est devenu l’un de ses modèles, à venir dans la capitale des Flandres pour donner une conférence.

Quatre ans plus tard, il est victime d’un premier AVC qui ne lui permet plus d’exercer son métier d’architecte. Sa fin de vie est marquée par le dénuement et la maladie. Nelly, sa fille cadette, décide de l’accueillir chez elle à Paris. En 1939, il est victime d’un nouvel AVC qui lui sera fatal. Il repose désormais en paix au Cimetière du Père-Lachaise, ses cendres se trouvent dans l’un des premiers columbarium du cimetière parisien.

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URL de la source (modifié le 25/08/2025 - 14:44): https://www.monsenbaroeul.fr/redecouvrir-mons-en-baroeul/parcours-pagnerre/gabriel-pagnerre-un-architecte-hors-norme