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21 juin 1915 - Saint Amarin - Ecole de garçons.

#32.1

L'école de Jules Ferry, laïque, gratuite et obligatoire de 7 à 13 ans, est, en ce début du XXième siècle, devenue une institution. Des écoles communales ont été construites dans le moindre petit village.

Ses instituteurs normaliens, hussards noirs de la république comme les appelait Charles Péguy, souvent issus du peuple, assurent alors à travers tout le pays, une admirable mission : instruire les jeunes français, filles ou garçons où qu'ils soient, quels qu'ils soient. Ils sont aussi souvent secrétaire de Mairie et sont avec le maire, le prête, le docteur ou le notaire, des autorités de références là où ils exercent.

On les imagine, à l'aube, rallumer le fourneau de la salle de classe, et inscrire au tableau la morale du jour :"L'ignorance toujours mène à la servitude " ou "bien mal acquis ne profite jamais". Puis les enfants arrivaient avec leurs galoches ou parfois de simples sabots fourrés de pailles, enlevaient bérets et pèlerine. Parfois, ils apportaient une bûche pour alimenter le poêle. Ils portaient tous une blouse ou un sarrau maculé de tâches d'encre. Ils s'asseyaient alors sagement sur leur banc, sortaient de leur musette de toile épaisse cahiers et plumiers attendant la parole du maître les bras croisés sur leur pupitre. Peut-être poursuivraient-ils la lecture des aventures d'André et Julien dans leur "tour de France par deux enfants" ou celles du jeune "Francinet" dont chaque chapitre s'ouvrait sur une maxime morale. Ainsi débute le chapitre III, "si vous prenez l'habitude de jouer sans cesse, le travail vous sera pénible [...]mais si vous prenez l'habitude de travailler, le travail vous deviendra peu à peu agréable". 

L'école de la république voulait former des citoyens mais aussi des patriotes. Cette dimension de l'éducation est présente dans les enseignements d'histoire et de géographie, en instruction civique,  dans les textes retenus pour les lectures, dictée ou rédaction jusque dans les exercices de gymnastique parfois emprunts d'accents militaires.  

La patrie, la nation sont glorifiées en toute occasion. Ainsi la plume la plus utilisée pour l'écriture l'illustre "sergent major" est-elle présentée dans une boîte décorée d'une image de victoire de l'armée Française (Valmy, Jemmapes, Wattignies en Sambre, ...) et entourée d'une bande tricolore.

C'est dans cette ferveur qu'ont été élevés à la communale les enfants devenus des hommes à l'aube de la première guerre mondiale et qui iront défendre le sol sacrée de la patrie ! 

1915-1917 - Chatel-Chéhéry - L'Ecole pendant l'occupation allemande.

#32.2

Empreints d'élan patriotique, ces enfants devenus hommes comme nombre d'instituteurs furent mobilisés en août 1914 alors que les écoliers sont encore en vacances d'été. La guerre a fait irruption dans toutes les têtes, celles des adultes comme celles des enfants. Ils voient, peut-être sans réellement comprendre,  leur père, entre inquiètude et exaltation, préparer son paquetage;  peut-être l'accompagnèrent-ils jusqu'à la gare ou au centre de regroupement pour un au-revoir, un adieu !   

Le 30 septembre 1914 , à la vielle de la rentrée scolaire, le ministre de l'instruction publique Albert Sarraut écrit aux recteurs d'académie: 'je désire que le jour de la rentrée , dans chaque classe, la première parole du maître aux élèves hausse le cœur vers la patrie et que sa première leçon honore la lutte sacrée où sont engagée nos armées'.

Pour les enfants demeurant dans les territoires rapidement occupés par l'armée allemande, le choc sera double. Au delà de la séparation, de l'atmosphère de guerre, c'est la France, dont on leur clamait les forces et les vertus depuis leur plus jeune âge, qui va s'effacer sous le joug allemand.

Les autorités Allemande maintiendront l’école obligatoire; comme les autorités françaises, elles ont  le souci d’éviter la présence d'enfants errants dans les rues. Pour l’occupant, il s’agit de préserver l’ordre public, pour les Français, il faut éviter la mendicité perçue comme une infamie.

Sur cette photo, il s'agit bien d'une classe d'élèves Français, des ardennais. Si on ne s'arrête pas à l'étole de fourrure que portent l'institutrice et l'une des écolières, tout semble normal à l'exception du panneau apposé sur la porte :"Schule" et de l'uniforme de l'auxiliaire Allemand à droite, le seul qui parait sourire. .

Photos - Albums Valois -  Bibliothèque de Documentation internationale contemporaine (BDIC)